ALTITUDE ATTEINTE PAR LES GLACIERS DANS LES ALPES
23


Les grands glaciers quaternaires ont atteint dans les vallées alpines des altitudes très importantes : c'est ainsi qu'à la verticale de Grenoble, le glacier würmien de l'Isère avait sa surface à 1200 m et que le glacier de la Romanche s'élevait à 2650 m au dessus du col d'Arsine
Toutefois les Alpes n'ont jamais été recouvertes d'une calotte glaciaire comparable à celles de l'Antarctique ou du Groenland et les principaux sommets n'ont jamais été recouverts. Les vallées voyaient bien passer des fleuves de glace gigantesques mais les arêtes qui les séparaient émergeaient, en longues crêtes bordées d'innombrables cirques.
Dans la terminologie anglo-saxonne, le niveau maximum atteint par les glaciers würmiens est le LGM ( last glacial maximum ).
Nous le verrons plus loin, la surface des anciens glaciers se raccordait, en bien des endroits, à celle des glaciers actuels, signe que la très haute montagne n'était guère plus englacée que de nos jours.
Ce fait est corroboré d'ailleurs par l'examen des hauts sommets: les faces, les arêtes sont déchiquetées, reflet d'une érosion périglaciaire (couple gel - dégel) et non lissés par le passage des glaces


Deux méthodes peuvent être utilisées pour déterminer l'altitude atteinte par les glaces dans les vallées alpines :
-- une méthode théorique, utilisant une formule mathématique qui reflète les propriétés physiques de la glace
-- une méthode basée sur l'observation directe du modelé glaciaire dans les paysages.
Ces deux méthodes d'analyse morphologique glaciaire se complètent, mais l'approche théorique du problème ne peut s'appliquer qu'à des vallées très larges, comme c'est le cas des parties inférieures des vallées du Rhône, de l'Isère et de la Durance. Plus haut dans les vallées, là où les effets de parois se faisaient sentir, la formule ne s'applique plus, mais garde le mérite de fournir une valeur minimum de l'altitude des glaces.

Pour en savoir plus sur l'approche théorique et son application aux grands glaciers quaternaires

En dessous d'une valeur que l'on peut estimer à 4 km très approximativement, seul l'examen du modelé glaciaire pourra donc permettre de déterminer l'altitude atteinte par les glaces dans les vallées.
Les repères morphologiques que l'on peut utiliser pour cette étude sont les suivants -- et le lecteur retrouvera là quelques-unes des pages qu'il vient de parcourir :

-- les roches moutonnées et autres formes mineures
-- les rebords d'auge et les épaulements
-- les moraines latérales et les dépôts glaciaires
-- les sillons marginaux d'épaulement et de diffluence



L'étude originale qui est présentée ici a porté sur 156 sites porteurs de repères morphologiques, 32 d'entre eux provenant de la littérature et des cartes géologiques et les 124 autres de recherches personnelles sur le terrain.
Ces sites se répartissent dans les principales vallées des Alpes françaises, leurs situations étant précisées sur des cartes figurant dans les pages "Pour en savoir plus" ci-dessous.
Nous n'examinerons ici que les principes de base et quelques-uns des résultats de cette étude, renvoyant le lecteur à ces pages complémentaires pour de plus amples renseignements :

Pour en savoir plus sur l'utilisation et les applications des repères morphologiques


LA METHODE

Les tableaux que l'on pourra consulter sur les pages "Pour en savoir plus" relatives à chaque vallée regroupent les principales caractéristiques des sites utilisés (roches moutonnées, rebords d'auge, épaulements, moraines, dépôts morainiques et sillons marginaux).
Nous avons reporté ces points sur des graphiques relatifs à chacune des vallées étudiées, ainsi que les surfaces pléniglaciaires würmiennes et rissiennes déterminées à l'aide de la formule.
Nous avons enfin tenté une reconstitution de la surface du pléniglaciaire en utilisant la position des sites caractéristiques et en tenant compte des règles suivantes :

- La courbe doit passer par le sommet des moraines latérales
- Elle doit rester toujours à une altitude au moins égale à celle des dépôts morainiques
- Elle doit passer à 100 mètres au-dessus du fond des sillons rocheux les plus hauts, à 50 m au-dessus du fond des sillons vallonnés les plus élevés et à quelques dizaines de mètres au-dessus du sommet des roches moutonnées.

Ces valeurs résultent de la comparaison, sur les quelques sites qui le permettent, des altitudes de sillons et de moraines latérales voisines.

- Enfin, la trace doit toujours être ascendante lorsqu'on remonte la vallée. Cette condition évidente permet de ne pas tenir compte des sites - très rares d'ailleurs - datant des stades de retrait.

Les points représentatifs des affluents ont été portés à titre d'information complémentaire.
On peut voir que la pente des affluents est toujours supérieure à celle des glaciers de vallées.


LES RESULTATS EN QUELQUES LIGNES

On peut donner les ordres de grandeur suivants de l'altitude atteinte par les glaciers au dessus de quelques points caractéristiques de diverses vallées :

Vallées de la Romanche et du Vénéon :
- Le Bourg d'Oisans : 1760 m au Würm, 1850 m au Riss
- Col du Glandon : 2300 m - La Grave : 2500 m
- La Bérarde : 2600 m

Vallée de l'Isère :
- Grenoble : 1220 m au Würm, 1310 m au Riss
- Albertville : 1900 m
- Moûtiers : 2000 m
- Bourg Saint Maurice : 2200 m

Vallée de l'Arc :
- Saint Jean de Maurienne: 2100 m

Vallées de la Durance et de ses affluents :
- Embrun : 1800 m au Würm
- Briançon : 2150 m au Würm
- Abries : 2500 m





LES RESULTATS DETAILLES

Les résultats détaillés de l'étude, ainsi que quelques cartes de zones particulièrement intéressantes ( Cols du Mont Cenis, du Lautaret, de l'Échelle et Bayard, seuil de Laye, lacs du bassin du Drac, environs de Grenoble ) figurent dans les pages suivantes :

Pour en savoir plus sur les glaciers de la vallée de la Romanche

Pour en savoir plus sur les glaciers de la vallée de l'Eau d'Olle

Pour en savoir plus sur les glaciers de la vallée du Vénéon

Pour en savoir plus sur les glaciers du bassin du Drac

Pour en savoir plus sur les glaciers de la vallée de l'Isère .....

..... et de la basse Isère

Pour en savoir plus sur le lobe du glacier rissien de l'Isère

Pour en savoir plus sur la Bièvre-Valloire ( Isère )

Pour en savoir plus sur les forêts de Chambaran et de Bonnevaux ( Isère )

Pour en savoir plus sur les glaciers de la vallée de l'Arc

Pour en savoir plus sur les Préalpes du Nord

Pour en savoir plus sur les vallées de la Durance et de ses affluents

.......et également :

Pour en savoir plus sur les anciens lacs du bassin du Drac


Pour en savoir plus sur les vallées du versant méditerranéen : Page en cours d'élaboration

Enfin,quelques chiffres relatifs au Rhône : Page en cours d'élaboration


Détermination de la glaciation responsable du modelé glaciaire


Nos conclusions seront les suivantes :

- La formule de Nye-Lliboutry, qui s'applique correctement dans le cas de vallées suffisamment larges, se trouve en défaut lorsque celles-ci deviennent trop étroites.
L'étude des glaciers alpins actuels montre que, lorsque la largeur de la vallée devient inférieure à 3 ou 4 km, la surface de la glace se situe à une altitude supérieure à celle indiquée par la formule.

- L'analyse morphologique glaciaire permet de déterminer l'altitude maximum atteinte par les glaciers lors des dernières glaciations en utilisant les repères morphologiques que constituent les moraines, les dépôts glaciaires, les roches moutonnées ainsi que les sillons marginaux.

Ces derniers, bien que peu étudiés jusqu'à présent, sont relativement abondants dans les hautes vallées et des critères de reconnaissance permettent de les identifier dans les paysages.

En définitive, s'il est certain que la méthode d'analyse morphologique glaciaire utilisée, basée essentiellement sur l'examen des repères morphologiques et le tracé de graphiques, permet une meilleure connaissance de l'altitude de la surface des glaciers, il apparaît que des études complémentaires sont nécessaires, en particulier :
- détermination plus précise de l'épaisseur de glace nécessaire au façonnement des roches moutonnées, des rebords d'auge et des sillons rocheux et vallonnés
- recherche de sites caractéristiques complémentaires à ceux étudiés ici, en particulier dans les vallées de l'Isère et de l'Arc
- extension du domaine étudié à la vallée du Rhône en aval du Léman
- attribution plus précise des repères morphologiques au Riss ou au Würm.



Retour en haut de page
Retour à la page d'accueil